Shugoro Yamamoto, premier nom de plume de Satomu Shimizu, est né le 22 juin 1903 à Hirosato (ville rebaptisée Otsuki en 1933), au Japon. Pour des raisons financières, il ne termine pas ses études secondaires et commence, dès 1917, à travailler dans un magasin de livres d’occasion, où le propriétaire, un Yamamoto, poursuit son éducation et lui lègue le nom sous lequel il publie à partir de 1926. Au fil de sa carrière, il emprunte plus d’une dizaine de pseudonymes différents.
Écrivant d’abord des livres pour enfant, il signe par la suite nombre de romans policiers et de fictions historiques au coeur desquels sont représentés paysans, femmes fortes et samouraïs. À travers son oeuvre, Yamamoto chante les « vertus populaires traditionnelles » et dénonce l’autorité. Lorsque lui est offert, en 1942, le prestigieux prix Naoki, il y renonce comme il renonce à une distinction entre « littérature pure » et « littérature populaire ».
Yamamoto, au fil des ans, devient « l’écrivain de prédilection du cinéaste » de Akira Kurosawa, inspirant à ce dernier non moins de trois films. L’écrivain dira de Barberousse(1965), réalisé deux ans avant sa mort, que le long-métrage est meilleur que le livre. Le roman Barberousse est généralement considéré comme sa création la plus achevée.
Voici un extrait de la traduction française de Barberousse dans lequel, le protagoniste principal, le médecin Kyojô, commente les politiques publiques de l’époque en matière de santé publique:
Le médecin peut reconnaître les symptômes, suivre l’évolution, et éventuellement aider un peu un organisme assez fort pour lutter, mais c’est tout. Voilà à quoi se limitent les capacités de la prétendue « science médicale ».
Kyojô agita une de ses robustes épaules, comme pour exprimer son autodérision face à cette triste constation.
— Ce que nous pouvons faire actuellement, ce que nous devons commencer par faire, c’est lutter contre la misère et l’ignorance. Seule la victoire sur la misère et l’ignorance peut pallier les insuffisances de la médecine, tu comprends?
— « C’est un problème politique, ça », songea Noboru. Comme s’il avait entendu Noboru énoncer tout haut sa pensée, Kyojô s’exclama avec véhémence:
— Tu peux toujours dire que c’est un problème politique, c’est la façon habituelle de se débarrasser de la question! Mais qu’est-ce que la politique a fait jusqu’à présent pour éradiquer la misère et l’ignorance, hein? Prends la misère, simplement: depuis le début du gouvernement d’Edo, il y a eu je ne sais combien de lois et d’ordonnances, mais peux-tu me citer un seul article interdisant de laisser les êtres humains vivre dans le dénuement?(YAMAMOTO, Shūgorō. Barberousse, traduit par Corinne Atlan, Éditions du Rocher, 2009 (1964), pp. 42-43; cet extrait est partagé en invoquant l’exception pédagogique)
Le 14 février 1967, Shugoro Yamamoto meurt d’une pneumonie aigüe. Il est enterré au cimetière de Kamakura. Vingt ans plus tard, en 1987, un prix littéraire[1] est créé en son honneur.
DOMAINE PUBLIC
Toute l’œuvre de Shūgorō Yamamoto appartiendra au domaine public dès le 1er janvier 2018. Voici la liste de ses œuvres principales, selon l’article de Wikipedia (FR):
- Vie des grands femmes japonaises (日本婦道記, 1942–1945)
- Les Sapins demeurent (樅ノ木は残った, 1954–1958)
- Barberousse (赤ひげ診療譚, 1958)
- Le conte de Blue Beka Boat (青べか物語, 1960)
- Une Ville sans saisons (季節のない街, 1962)
- Sabu (さぶ, 1963)
Références
- Wikipedia (FR)
- Wikipedia (ENG)
- Bibliothèque nationale de France
- NOGAMI, Teruyo. Waiting on the Weather: making movies with Akira Kurosawa, Stone Bridge Press, 2006, 296 p.
- RAMBAUD. Dictionnaire de Littérature Japonaise sous la direction de Jean-Jacques Origas, Presses Universitaires de France, 2000, 384 p.
Notes et liens complémentaires
- ⬆️ Le Prix Yamamoto Shugoro
- GIRARD, Martin et LARUE Johanne. « Vidéo », Séquences, numéro 143, 1989, 96 p.