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âLa musique a toujours Ă©tĂ© actuelle, et il est important quâelle le reste.â
Pierre Mercure, compositeur (21 fĂ©vrier 1927 â 29 janvier, 1966)
Pierre Mercure est un compositeur quĂ©bĂ©cois et une figure de proue de la musique actuelle. Il est aussi connu comme un des premiers grands rĂ©alisateurs quĂ©bĂ©cois. NĂ© Ă MontrĂ©al le 21 fĂ©vrier 1927, il meurt dâun accident de la route prĂšs d’Avallon en France, un soir de janvier en 1966. Il a 38 ans.
Benjamin dâune famille de trois enfants, son pĂšre, Louis Mercure, est comĂ©dien et avocat, et sa mĂšre, Ălizabeth DuprĂ©, est musicienne. EncouragĂ© par sa mĂšre et sa tante, il dĂ©couvre le monde des sons dĂšs son plus jeune Ăąge. Il apprend la musique Ă lâĂcole supĂ©rieure de musique dâOutremont qui deviendra lâĂcole de musique Vincent-dâIndy. Il fait aussi ses Ă©tudes classiques au CollĂšge Jean-de-BrĂ©beuf.
AprĂšs avoir explorĂ© le piano, lâorgue, le violoncelle, il choisit le basson comme instrument principal et devient premier bassoniste Ă l’Orchestre symphonique de MontrĂ©al. FormĂ© au Conservatoire de musique de MontrĂ©al (CMM), de 1944 Ă 1949, sous les auspices de Marvin Duchow et Claude Champagne, il aspire Ă une carriĂšre de chef dâorchestre. Il poursuivra ses Ă©tudes Ă Paris, avec Arthur HoĂ©rĂ©e et Jean Fournet.
Claude Champagne lâinitie Ă lâunivers de la musique française et le forme Ă lâart de lâorchestration. Ses premiĂšres Ćuvres. KalĂ©idoscope (1947-1948, rev. 1949), un chef dâĆuvre de la musique canadienne, et Pantomime (1948, rev.1949) traduisent cette influence.
CrĂ©Ă©e alors quâil est encore inscrit au Conservatoire et interprĂ©tĂ©e par lâOrchestre symphonique de MontrĂ©al, KalĂ©idoscope est une oeuvre de jeunesse expressive et ambitieuse dans un registre conventionnel. Si lâon Ă©coute Lignes et points (1964), une commande de lâOrchestre symphonique de MontrĂ©al, on peut mesurer lâĂ©volution de son parcours crĂ©atif vers la dĂ©construction de la forme.
En 1951, il rencontre Luigi Dallapiccola Ă Tanglewood, aux Ătats-Unis, et frĂ©quente la musique sĂ©rielle. ExposĂ© aux principes et aux contraintes formels du dodĂ©caphonisme, il prĂ©fĂšre leur tourner le dos pour privilĂ©gier lâimpulsion et la libertĂ© du geste crĂ©ateur.
InspirĂ©s par Ravel et Honegger, il compose Cantate pour une joie, en 1955, sur sept poĂšmes de Gabriel Charpentier – qui est lâun de ses amis. Cette oeuvre pour soprano, chĆur et orchestre constitue sa premiĂšre crĂ©ation majeure. IntĂ©grant des oeuvres plus anciennes, Ils ont dĂ©truit la ville et les trois mĂ©lodies de Dissidence, Cantate pour une joie cĂ©lĂšbre les temps modernes avec fougue et lyrisme. La scĂšne musicale quĂ©bĂ©coise renoue rĂ©guliĂšrement avec cette fantaisie symphonique depuis sa toute premiĂšre interprĂ©tation, le 1er fĂ©vrier 1956 Ă lâauditorium Le Plateau de MontrĂ©al au coeur du parc Lafontaine.
Ă la suite dâun stage dâĂ©tudes en Europe, en 1957- 58, pendant lequel il cĂŽtoie Pierre SchaĂ«ffer et le Groupe de recherches musicales de la RTF, Mercure aborde la musique Ă©lectroacoustique. De 1959 Ă 62, il compose ses oeuvres Ă lâaide de sons concrets quâil transfigure avec des appareils Ă©lectroniques, une dĂ©marche qui rĂ©pond Ă son ardent besoin dâexpĂ©rimenter, de se renouveler sans cesse et de promouvoir lâactualitĂ© musicale avec sincĂ©ritĂ©.
Pierre Mercure est aussi le principal organisateur de la premiĂšre Semaine internationale de musique actuelle qui prĂ©sente, Ă MontrĂ©al, des Ćuvres de plusieurs compositeurs qui sont des figures de premier plan dans le monde de la musique actuelle (John Cage, Christian Wolff, Mauricio Kagel, Toshi Ichiyanagi, Iannis Xenakis). Ces concerts sont prĂ©sentĂ©s Ă la ComĂ©die canadienne en aoĂ»t 1961.
Ces rencontres seront dĂ©terminantes pour les Ćuvres qui suivront et qui incarnent sa maturitĂ©. Mercure pratique dĂ©sormais un langage original fondĂ© sur des rĂ©fĂ©rents musicaux traditionnels quâil rĂ©invente (Lignes et points) ou quâil structure Ă lâaide de rĂšgles inĂ©dites (Psaume pour abri, TĂ©trachromie) :
« Fort de ses expĂ©riences nouvelles, Mercure Ă©crit Psaume pour abri (1963),TĂ©trachromie (1963), et Lignes et points (1964). Bien que l’on retrouve partitions et instruments traditionnels, la transformation syntaxique de la langue musicale est Ă©vidente : les trois Ćuvres sont Ă©crites sur une sĂ©rie de douze sons regroupĂ©s par cellules de trois, quatre ou cinq sons; les formes sont uniques; l’espace s’est multipliĂ© et le silence fait partie intĂ©grale du temps musical. Cependant Mercure s’attache encore Ă l’organisation des moindres dĂ©tails d’une oeuvre » (Lyse Richer, « Pierre Mercure », Compositeurs au QuĂ©bec no 9, Centre de musique canadienne, p.12.)
Cette premiĂšre Semaine internationale de musique actuelle reprĂ©sente aussi un moment charniĂšre pour l’Ă©volution musicale du QuĂ©bec et son accĂšs Ă la modernitĂ©.
FascinĂ© par les techniques Ă©mergentes et les compositeurs qu’il a rencontrĂ©s, Mercure Ă©labore H2O per Severino Ă travers le champ nouveau, et plus conceptuel, de la musique alĂ©atoire. Cette Ćuvre peut ĂȘtre jouĂ©e par un groupe de quatre Ă dix instruments mais elle fut crĂ©Ă©e par un seul flĂ»tiste, Robert Langevin, jouant quatre flĂ»tes au Festival d’Ă©tĂ© de QuĂ©bec au dĂ©but des annĂ©es 1980. Celui qui se dĂ©crivait comme un âinventeur de sonsâ invente dĂ©sormais des procĂ©dĂ©s qui permettent Ă lâinterprĂšte de choisir lâordre dans lequel les Ă©lĂ©ments sont prĂ©sentĂ©s. Il souhaite suggĂ©rer une nouvelle version de lâoeuvre Ă chacune de ses reprĂ©sentations.
La libertĂ© de lâimpulsion est au coeur de son processus crĂ©atif. Il convient de le citer Ă ce sujet:
Affirmer ma vibration personnelle en termes sonores : voilĂ comment je dĂ©finis ma recherche. Je nâattends pas, pour Ă©crire, une inspiration intĂ©rieure personnelle et Ă©goĂŻste. Je veux une oeuvre dynamique et ascendante. Quelque chose de positif, quelque chose qui sâaffirme. Cela nâa rien dâintellectuel. Câest au contraire vibrant, sensible, lyrique. Il sâagit pour moi dâautomatisme en musique. (CitĂ© par Johanne Rivest, 1998, p. 63)
âAutomatisme en musiqueâ, lâexpression renvoie directement au manifeste du Refus global. Certes, Pierre Mercure ne fait pas partie des signataires du manifeste mais son oeuvre est, de part en part, signĂ©e par ce projet. Il collabore avec plusieurs des automatistes : Jean-Paul Riopelle, Jean-Paul Mousseau, Françoise Sullivan et, surtout, avec Françoise Riopelle qui deviendra sa compagne. Il adhĂšre au rejet des valeurs conservatrices et son inspiration musicale se nourrit de cette libertĂ© si chĂšre aux automatistes.
Peintres, Ă©crivains, chorĂ©graphes, sculpteurs du Refus global, participent Ă la crĂ©ation dâoeuvres qui dĂ©cloisonnent les catĂ©gories artistiques avec la conviction quâaucune forme dâart nâen domine une autre. Pierre Mercure souscrit pleinement Ă cette intention transdisciplinaire : musiques pour ballets, univers sonores, rĂ©citals accompagnĂ©s dâĂ©clairages ou de sculptures en direct, ces dialogues ouverts entre les arts lui permettront de comprendre un autre mĂ©dium intĂ©grateur comme peu sauront le faire : la tĂ©lĂ©vision.
Mercure devient un rĂ©alisateur d’Ă©missions musicales tĂ©lĂ©visĂ©es qui fera sa marque au service de la SociĂ©tĂ© Radio-Canada. RĂ©putĂ© pour son audace et la qualitĂ© de son travail, on lui doit, Ă partir de 1954 un nombre considĂ©rable dâĂ©missions musicales : « L’Heure du concert », « Concerts pour la jeunesse », «Jazz Workshop », « Music-Hall », « Pays et merveilles », etc.
On ne peut manquer de souligner, en guise de conclusion, que le projet artistique de Pierre Mercure est viscĂ©ralement dĂ©diĂ© au rayonnement de la culture et, dans un mĂȘme Ă©lan, au droit Ă la libertĂ© dâexpression contre les censures et les interdits.
Note : Nous remercions Lyse Richer, spĂ©cialiste de lâoeuvre de Pierre Mercure, pour avoir gĂ©nĂ©reusement rĂ©pondu Ă nos questions.
Domaine public
Les partitions et les textes Ă©crits sont les Ćuvres de Pierre Mercure qui viendront enrichir le domaine public.
Ćuvres
Compositions
- Orchestre
Kaléidoscope (1948, rév. 1949)
Ils ont détruit la ville (1950)
Cantate pour une joie (1955)
Divertissement (1957 rév. 1958)
Triptyque (1959)
Lignes et points (1964)
- Musique de chambre
Pantomime (1948, rév. 1949)
Colloque (sur des paroles de Paul Valéry, 1948)
Dissidence (1957, rév. 1958)
H2O per Severino (1965) – musique alĂ©atoire
- Musique Ă©lectroacoustique
Jeu de hockey (1961)
RĂ©percussions (1961)
Structures métalliques III (1962)
Psaume pour abri (1963) – avec instruments
- Danse moderne
Dualité (1948)
La Femme archaĂŻque (1949)
LucrĂšce Borgia (1949)
Emprise (1950)
Improvisation (1961)
Incandescence (1961)
Structures métalliques I et II (1961)
Tétrachromie (1963) avec bande magnétique
Manipulations (1964)
Surimpressions (1964)
Films
La Forme des choses (1965)
ĂlĂ©ment 3 (1965)
BAnQ Vieux-MontrĂ©al conserve les fonds dâarchives de Pierre Mercure (MSS60) et de Gabriel Charpentier (P873)
Sources
- Anthologie de musique canadienne : Pierre Mercure, 4 disques compact, no ACM 35, Collection dâĆuvres par Pierre Mercure. Inclut un documentaire audio en français. https://www.musiccentre.ca/node/14151
- Caron, Claudine, « La musique de Pierre Mercure Ă lâaffiche des spectacles de danse », Circuit : musiques contemporaines, vol. 21, no 3, 2011, p. 9-21. https://www.erudit.org/revue/circuit/2011/v21/n3/1006357ar.pdf
- « les Dupré, générations 7 à 10 », sur www.claude.dupras.com (consulté le 29 novembre 2016)http://www.claude.dupras.com/new_page_275.htm
- Huss, Christophe, « Pierre Mercure, 50 ans aprÚs », Le Devoir, 28 janvier 2016. http://www.ledevoir.com/culture/musique/461381/musique-classique-pierre-mercure-50-ans-apres (Consulté le 29 novembre 2016)
- Léger, Marthe, « Cantate pour une joie de Pierre Mercure », Instantanés, BAnQ http://blogues.banq.qc.ca/instantanes/2016/02/03/cantate-pour-une-joie-de-pierre-mercure-et-gabriel-charpentier/ (Consulté le 29 novembre 2016)
- Richer, Lyse, « Mercure, Pierre », LâEncyclopĂ©die de la musique au Canada, MontrĂ©al : Ăditions Fides, 1983, 1142 p. ; 2eĂ©d. rev. et augm. : 1993, 3 volumes (3810 p.) ; Ăd. en ligne : Toronto, Historica Foundation of Canada, 2001. http://www.thecanadianencyclopedia.ca/en/article/pierre-mercure-emc/ (ConsultĂ© le 29 novembre 2016)
- Richer, Lyse, « Pierre Mercure », Compositeurs au Québec, fascicule no 9, Centre de musique canadienne.
- Rivest, Johanne, « La représentation des avant-gardes à la semaine internationale de musique actuelle (Montréal, 1961) », Canadian University Music Review / Revue de musique des universités canadiennes, vol. 19, no 1, 1998, p. 50-68. https://www.erudit.org/revue/cumr/1998/v19/n1/1014605ar.pdf
- SDEC (SOCAN), « Pierre Mercure : Biographie », Vitrine des compositeurs, Centre de musique canadienne. https://www.centremusique.ca/fr/node/37287/biography (Consulté le 29 novembre 2016)
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