Charles Thorson, dont le nom Ă la naissance est Karl Gustav Stefanson, voit le jour  le 20 aoĂ»t 1890 Ă Gimli, dans la province du Manitoba, au Canada. Ses parents, d’origine islandaise, avaient immigrĂ© trois ans plus tĂŽt. Il demeurera attachĂ© Ă cette culture toute sa vie, publiant des articles et des caricatures politiques dans les quotidiens et revues en islandais.
Parmi les quatre enfants de la famille, il est celui dont la faible assiduité scolaire laissait présager un avenir difficile. Plus ambitieux  son frÚre aßné, Joseph Thorson, devient avocat, puis se lance en politique pour devenir, plus tard, ministre des services nationaux de guerre dans le cabinet de William Lyon Mackenzie King.
S’il n’a que peu d’intĂ©rĂȘt pour l’Ă©cole, qu’il abandonne dĂšs le dĂ©but de son adolescence, Charles dĂ©montre un talent remarquable pour le dessin et, surtout, un regard vif sur les traits de caractĂšres et les travers de son entourage. TrĂšs tĂŽt, il travaille comme illustrateur semi-professionnel et rĂ©alise des dessins humoristiques et des caricatures politiques pour des publications locales. Il se marie en 1914, avec Rannveig âRankaâ Sweinsson, avec laquelle il aura un fils. Ces derniers sont emportĂ©s par la tuberculose, deux ans plus tard. Il quitte son emploi et prend la route pour Vancouver, puis vagabonde sur les routes de l’ouest canadien, alternant matchs de boxe, travail d’illustration, jeux de cartes et billard et petits emplois. Il se remarie en 1922, avec Ada Teslock. Ils ont bientĂŽt un fils, qui dĂ©cĂšde peu aprĂšs sa naissance, puis un autre enfant, Stephen. Le couple divorce en 1932.
Charles Thorson travaille alors comme dessinateur publicitaire pour un studio d’arts graphiques, Brigden’s, qui produit, entre autres, le catalogue de vente par correspondance d’Eaton, la chaĂźne de grands magasins. Il y dĂ©veloppe ses talents d’observation et une grande habiletĂ© technique afin de rendre attractive l’apparence d’une grande variĂ©tĂ© de produits. Au cours de cette pĂ©riode, les difficultĂ©s de sa vie personnelle et son caractĂšre fantasque l’amĂšnent Ă frĂ©quenter des bars et salles de jeu. Il s’amourache d’une jeune serveuse islandaise, Kristin Solvadottir, et rĂ©alise d’elle de nombreux portraits. Son apparence et sa silhouette serviront, plus tard, Ă donner forme au personnage de Blanche-Neige.
Ă 44 ans, Charles Thorson quitte Winnipeg pour Hollywood avec un portfolio rempli de dessins de personnages attachants, souvent anthropomorphes, et de scĂ©narios. Depuis le dĂ©but des annĂ©es 30, les Ă©crans de cinĂ©ma accueillent des courts mĂ©trages sonores en dessin animĂ©. Souvent appelĂ© Charlie Thorson, il passera plus de dix annĂ©es dans les studios d’animation de Disney, M.G.M. et Warner Brothers, puis Fleischer Studios, Ă Miami. Il se familiarise avec la production de film d’animation aux studios de Walt Disney pour lequel, il modĂšle les personnages de Blanche-Neige et de six nains (un septiĂšme sera ajoutĂ© par la suite). C’est lĂ Â qu’il dĂ©veloppe son style particulier : mĂ©lange attendrissant d’anthropomorphisme et de traits enfantins; une esthĂ©tique destinĂ©e Ă charmer en appuyant sur l’effet « mignon » (cuteness, en anglais). Il est au sommet de son art lorsqu’il donne au lapin Bugs Bunny son allure dĂ©finitive et son nom. Il crĂ©e pour le cinĂ©ma d’animation, une ribambelle de personnages, nouveaux ou remodelĂ©s, qui font dĂ©sormais partie de la culture populaire amĂ©ricaine, tel que Popeye, Elmer Fudd, Raggedy Ann et Andy. Rarement mentionnĂ© dans les crĂ©dits des courts mĂ©trages animĂ©s, comme c’est le cas, Ă l’Ă©poque, pour de nombreux artisans du dessin d’animation, Charles Thorson ne semble pas rechercher la cĂ©lĂ©britĂ©. Mais son style et son coup de crayon distinctifs sont reconnus et signalĂ©s dans une filmographie qui lui est consacrĂ©e.
Il retourne au Manitoba en 1946, avec un projet en tĂȘte: Ă©crire et illustrer un livre pour enfants. Entre temps, il se met au travail pour Eaton, un client qu’il connait bien et qui lui demande de crĂ©er un personnage pour la parade de NoĂ«l qu’il commandite. Punkinhead, le « petit ours triste » devient dĂšs lors la mascotte de la maison Eaton, qui publie par la suite des contes avec les histoires et illustrations de Thorson. Le projet personnel de Thorson, son livre pour enfants intitulĂ©Â Keeko, est publiĂ© en 1947 et lui vaut d’ĂȘtre reçu membre honoraire de la International Mark Twain Society. Le personnage de Keeko, comme d’autres crĂ©ations reprĂ©sentant des africains, tĂ©moigne cependant de l’enracinement des stĂ©rĂ©otypes raciaux dans la culture populaire nord-amĂ©ricaine.
RetraitĂ© en 1956, Charles Thorson rejoint la famille de son fils, Stephen, qui s’Ă©tait installĂ©e Ă Haney, prĂšs de Surrey, en Colombie-Britannique. Il meurt, Ă Vancouver, d’un cancer, quelques jours avant son 76iĂšme anniversaire. Sa famille a fait don de ses archives Ă l’universitĂ© du Manitoba. Une murale lui rendant hommage a Ă©tĂ©Â peinte sur un bĂątiment de Winnipeg en 2005. Elle le mettait en vedette avec ses personnages les plus connus. EffacĂ©e par un propriĂ©taire peu fĂ©ru d’histoire, il en reste des traces, dont cette photographie.
Oeuvres
- Fonds Charles Thorson, University of Manitoba Libraries, 1928-1967 (ouvrages, illustrations, dessins et aquarelles produits pour divers studios dont Disney, Warner Brothers, M.G.M., poÚmes, scénarios, correspondance) http://umanitoba.ca/libraries/units/archives/collections/rad/thorson.html
- Documents numérisés http://umanitoba.ca/libraries/units/archives/digital/thorson/index.html
Sources
- Icelandic National League of North America, Charles (Charlie Thorson) http://www.inlofna.org/Charles-(Charlie)-Thorson
- Manitoba History: Review: Gene Walz, Cartoon Charlie: The life and art of animation pionneer Charles Thorson http://www.mhs.mb.ca/docs/mb_history/37/cartooncharlie.shtml
- Charles Thorson: Character design in classic animation, Gene Walz, Animation World Magazine, numéro 2.6, septembre 1997 http://www.awn.com/mag/issue2.6/2.6pages/2.6walzthorson.html
- Charles Thorson, IMDb, Filmography, http://www.imdb.com/name/nm1878384/
- Reading the Rabbit: Explorations in Warner Bros. Animation, Kevin S. Sandler, Rutger University Press, 1998Â https://books.google.ca/books/about/Reading_the_Rabbit.html?id=zd_WTZZjvqkC&redir_esc=y