Ernesto Rafael Guevara est né le 14 juin 1928 dans une famille bourgeoise de Rosario, en Argentine. Rien — à part, peut-être, les ascendances basques1 et irlandaises de son père 🙂 — ne semblait le prédestiner à devenir le révolutionnaire marxiste et internationaliste à jamais immortalisé dans ce cliché à la renommée désormais planétaire. →
Il faut donc chercher l’explication de son destin épique ailleurs. Permettez-moi de me perdre en conjectures. Dans ses passions de jeunesse, d’abord — la lecture et le sport. L’une lui aura sans doute appris à observer, à réfléchir, à raisonner, tandis que l’autre lui aura inculqué le goût de l’effort, du grand air et de la liberté. Pourquoi pas?
Ce qui est certain, c’est que son premier grand voyage le détourna définitivement de ses études de médecine. Au cours de ce périple à moto de plus de 5000 km, de l’Argentine au Vénézuela en passant par le Chili et la Cordillère des Andes, il rédigea son premier carnet de notes de longue haleine, véritable récit initiatique dont voici un court extrait:
« Au moins, je ne m’abreuve pas aux mêmes sources que les touristes et je m’étonne de voir dans les cartes publicitaires de Jujuy, par exemple, l’Autel de la Patrie, la cathédrale où le drapeau national a été béni, le joyau de la chaire et la miraculeuse Vierge de Río Blanco et Paypaya. […] On ne connaît pas un peuple, sa culture et sa façon de vivre là où règne le luxe. Son âme transparait dans les patients des hôpitaux, les prisonniers des commissariats ou ce piéton anxieux avec qui l’on fraternise — tout comme la Grande Rivière dévoile la turbulence et la force de son courant par en-dessous. »
— Traduction libre d’un extrait de Notas de viaje (diarios de motocicleta)2)
À 23 ans, il découvre ainsi deux réalités — la misère et l’inégalité — et deux émotions — la révolte et la compassion — qui détermineront fortement son engagement révolutionnaire.
Toujours dans ses notes de voyage, Guevara raconte qu’avec son compagnon de route, Alberto Granado, il découvre alors le pouvoir du « Che! » (littéralement: voici) que les Argentins accolent à leur nom pour se présenter3. Jugée exotique par les étrangers, cette interjection leur gagne la bienveillance des gens rencontrés sur la route mais elle lui collera en retour à la peau. Le carnet du « petit Che » Guevara et le livre du « grand Che » Granado4 retraçant ce périple fourniront la matière première du savoureux road movie réalisé par Walter Salles5 en 2004:
Quant à la fameuse maxime révolutionnaire, « Hasta la victoria siempre! », elle trouve sa source historique dans la lettre d’adieu que Guevara adressa à Fidel Castro avant de quitter Cuba, en 1965, puis de plonger dans la clandestinité6.
Deux ans plus tard, le Che était exécuté sommairement par l’armée bolivienne. Il avait traversé le ciel de l’histoire comme une étoile filante, laissant derrière lui une longue traînée de mots enflammés dont la braise n’est toujours pas éteinte.
Domaine public
Che Guevara était un auteur prolifique qui écrivait son journal ou des notes pour ses ouvrages presque quotidiennement, même au cœur des opérations de guérilla. L’ensemble de ses livres, cahiers de notes et articles originaux en espagnol tomberont dans le domaine public canadien dès le 1er janvier 2018. Ce sera également le cas à Cuba, mais pas en Argentine, où la protection accordée par le droit d’auteur s’étend jusqu’à 70 ans après la disparition de l’auteur7. Ce ne sera pas non plus nécessairement le cas des traductions, dont la durée de protection posthume commence à la mort du traducteur, et non à celle de l’auteur original.
Références
Autres sources
- Article de Wikipedia sur le film Carnets de voyage (2004), tiré du livre Diarios de motocicleta: Notas de viaje por América Latina.
Notes et liens complémentaires
- Le père d’Ernesto était originaire du village de Gebara, au Pays basque espagnol.
- Extrait cité dans es.wikipedia.org.
- Voir Che Guevara > Étymologie du nom (Wikipedia) et la critique de Voyage à motocyclette par Anastasia-B (Babelio, 20-11-2012).
- Voir Sur_la_route_avec_Che_Guevara par Alberto Granado (Wikipedia).
- Voir Carnets de voyage (Wikipedia).
- Lettre d’adieu à Fidel Castro-1965 (WikiSource) et Che Guevara > Clandestinité (Wikipedia).
- Voir Durée du droit d’auteur par pays (Wikipedial).
Illustration
• Calendario 2018 Che Guevara, 2017, Éditions Ocean Sur, photographié à La Havane par Christian Aubry [domaine public]
• El Che leyendo el diario La Nación (agosto 1961), photographe inconnu, via Wikipedia.