« Qui suis-je ? Si par exception je m’en rapportais Ă un adage : en effet pourquoi tout ne reviendrait-il pas Ă savoir qui je ‘ hante ‘ ? » (AndrĂ© Breton, Nadja, 1928).
AndrĂ© Breton naĂźt le 19 fĂ©vrier 1896 Ă Tinchebray, dans le dĂ©partement normand de lâOrne. Il passe les quatre premiĂšres annĂ©es de sa vie Ă Saint-Brieuc, avant que sa famille ne sâinstalle, en 1900, Ă Pantin, prĂšs de Paris. Son enfance se dĂ©roule sans incidents, mais non sans ennui, en raison du rigorisme de sa mĂšre. MĂȘme si Breton estime monotone la vie estudiantine, il sâenflamme au collĂšge Chaptal d’un premier amour fou : un professeur lâinitie Ă la poĂ©sie de MallarmĂ© et il plonge dans lâunivers de Huysmans, de Baudelaire et des symbolistes. SitĂŽt, il couche sur le papier des poĂšmes qui Ă©veillent sa vocation dâĂ©crivain et quâil publie grĂące Ă Jean RoyĂšre, en 1914, dans La Phalange. Ă cette Ă©poque, il fait la connaissance de Paul ValĂ©ry. Breton poursuit ensuite avec ThĂ©odore Fraenkel, des Ă©tudes en mĂ©decine.
Alors que la France entre en guerre, le jeune poĂšte, jeune adulte, se montre rĂ©fractaire au nationalisme Ă©mergeant. IncorporĂ©, en avril 1915, dans un rĂ©giment dâartillerie Ă Pontivy, Jarry et Rimbaud lui servent de compagnons. AppelĂ© peu aprĂšs Ă Nantes dans le service de santĂ©, Breton se lie dâamitiĂ© avec Jacques VachĂ© â « rencontre la plus dĂ©cisive de sa vie » â et dĂ©couvre lâhumour comme arme de rĂ©sistance, de « rĂ©sistance absolue ». Pratiquant dans divers hĂŽpitaux tout au long de la guerre, câest Ă Saint-Dizier, au Centre de neurologie, quâil cultive sa passion pour la thĂ©orie freudienne puis quâil perçoit puissance crĂ©atrice de la folie. Quand l’armistice est signĂ©, Breton compte parmi ses amis Apollinaire, Reverdy, Soupault et Aragon ; il trouve, dans lâĆuvre de LautrĂ©amont, une nouvelle source dâinspiration.
LâannĂ©e 1919 marque un tournant : deux ans aprĂšs le premier usage du terme « surrĂ©aliste » par Apollinaire, Breton publie Mont de piĂ©tĂ©, son premier recueil de poĂšmes, dans lequel il troque l’exploration des formes de la poĂ©sie contre des rĂ©flexions touchant sa nature et qui resteront omniprĂ©sentes dans le reste de son Ćuvre. Il Ă©crit, avec Soupault, Les Champs magnĂ©tiques, le « premier ouvrage surrĂ©aliste (mais nullement dada) ». Puis paraĂźt le premier numĂ©ro de LittĂ©rature, revue fondĂ©e et dirigĂ©e par les « trois mousquetaires » (suivant la maniĂšre dont ValĂ©ry â qui donna son nom Ă ladite revue â dĂ©signait Aragon, Breton et Soupault).
Au cours des annĂ©es 20, Breton fait figure de chef de file du mouvement surrĂ©aliste qui, progressivement, prend forme ; la distinction entre celui-lĂ et le dadaĂŻsme ne sâimpose quâĂ partir de 1922. DĂšs lors, le futur « pape du surrĂ©alisme », dĂ©sillusionnĂ© et percevant en Tristan Tzara ce quâil aimait tant chez VachĂ© (dĂ©cĂ©dĂ© en 1919), se lasse du nihilisme des dadas. Le schisme sâensuit et Breton repousse lâĂ©cole de Zurich, mais aussi Picabia, Soupault, Aragon. Par ailleurs, son cercle s’agrandit avec de nouveaux complices : Crevel, Desnos, Ăluard, PĂ©ret, Vitrac. Ă LittĂ©rature succĂšde La RĂ©volution surrĂ©aliste, tandis quâil signe, en 1924, le Manifeste du surrĂ©alisme. Dans cette foulĂ©e, le principal thĂ©oricien du courant dĂ©construit la dĂ©claration des droits de lâhomme et Ă©labore une dĂ©finition de surrĂ©alisme conçu comme  un «automatisme psychique pur ».
En 1925, il sâoppose au nationalisme exacerbĂ©, suscitĂ© par lâintervention française dans la guerre du Rif, et sâintĂ©resse aux Ă©crits de Trotski. Ainsi commence, entre Breton et le communisme, une longue histoire dâamour suivie dâun grandissant dĂ©samour qui atteint son nadir en 1935. Bien quâil adhĂšre Ă lâidĂ©ologie, il ne peut se rattacher officiellement Ă un quelconque groupe sans quâune altercation n’Ă©clate. La ferveur communiste nâest pas seule Ă animer Breton : il sâĂ©prend de LĂ©ona Delcourt puis de Suzanne Muzard si bien quâil divorce de Simone Breton (nĂ©e Kahn), sa conjointe de huit ans, en 1929, une annĂ©e aprĂšs la parution de Nadja, chef-dâĆuvre inspirĂ© par et dĂ©diĂ© Ă ces muses.
Au tournant de la dĂ©cennie, le mouvement sâessouffle. La rĂ©volution surrĂ©aliste est sur le point de s’Ă©teindre, puis paraĂźt le Second Manifeste du surrĂ©alisme qui lui donne une seconde vie. Breton, maĂźtre de lâĂ©ristique, Un Cadavre aux yeux de certains, suscite polĂ©mique et controverse avant de crĂ©er, en 1930, Le SurrĂ©alisme au service de la rĂ©volution, revue entraĂźnĂ©e par lâ« évolution doctrinale » du courant.
Breton est sans le sou. Il demeure nĂ©anmoins actif sur les scĂšnes politique et artistique. Prolifique, Ă©crivant nombre dâessais et dâouvrages, notamment Les Vases Communicants (1932), dĂ©coulant de son intĂ©rĂȘt pour Freud. En 1934, la chance lui sourit : quand il rencontre Jacqueline Lamba, c’est le coup de foudre immĂ©diat et rĂ©ciproque ; en aoĂ»t, ils sâĂ©pousent en prĂ©sence dâĂluard, de Giacometti, de Man Ray. Pour elle, il rĂ©dige LâAmour fou (1937). Aube, leur fille, naĂźt en 1935.
Avant la Seconde Guerre mondiale, Breton voyage Ă travers le monde et fait halte Ă Bruxelles, Ă Prague, aux Canaries et Ă Londres. Regagnant Paris Ă lâoccasion de lâĂ©dition française de lâExposition Internationale du SurrĂ©alisme de 1938, il quitte aussitĂŽt pour le Mexique. AuprĂšs de Diego Rivera et de Frida Kahlo, il sâassocie Ă LĂ©on Trotski ; Pour un art rĂ©volutionnaire indĂ©pendant reprĂ©sente le fruit de leur collaboration.
DĂšs 1939, Breton est mobilisĂ© puis, en 1940, affectĂ© aux services mĂ©dicaux Ă l’Ă©cole d’aviation de Poitiers. Dans la dĂ©route de lâarmĂ©e française, il se rĂ©fugie, dâabord, chez Pierre Mabille et, ensuite, au sein du ComitĂ© de secours amĂ©ricain aux intellectuels de Varian Fry. Voyant son Ćuvre censurĂ©e et son nom dĂ©shonorĂ© par le RĂ©gime de Vichy, il plie bagage en 1941 et se rĂ©fugie en Martinique oĂč il rencontre AimĂ© CĂ©saire. Il rejoint ensuite le sol amĂ©ricain.
Ă New York, le pĂšre du surrĂ©alisme en exil dĂ©montre sa polyvalence : il Ă©crit, lance une revue, monte une exposition avec Marcel Duchamp et joue le rĂŽle de speaker pour les Ă©missions françaises de l’Office of War Information. Peu aprĂšs sa rupture avec Jacqueline, il rencontre Ălisa Bindorff ; elle lui inspire Arcane 17, Ćuvre maĂźtresse quâil entame en 1944, pendant un sĂ©jour Ă GaspĂ©, au QuĂ©bec. Bindorff et Breton se marient aux Ătats-Unis,
La guerre terminĂ©e, Breton rentre en France. Il continue de publier, d’organiser des Ă©vĂšnements et de sâimpliquer sur le plan politique. Il passe de vie Ă trĂ©pas, le 28 septembre 1966, atteint dâasthme.
Oeuvre
- Poésie et récits
- Mont de piété
- Clair de terre,
- Les Pas perdus
- Poisson soluble
- Nadja
- LâImmaculĂ©e conception, en collaboration avec Paul Ăluard
- L’Union libre
- Le Revolver Ă cheveux blancs
- Les Vases communicants
- L’Air de l’eau
- Point du jour
- Au lavoir noir
- Le Chùteau étoilé
- L’Amour fou
- Fata morgana
- Pleine marge
- Arcane 17
- Young cherry trees secured against hares / Jeunes cerisiers garantis contre les liÚvres
- Signe ascendant
- Martinique, charmeuse de serpents
- La Lampe dans l’horloge
- Au regard des divinités
- Adieu ne plaise
- Constellations
- Le La
- Essais
- Manifeste du surréalisme, augmenté de la Lettre aux voyantes
- Légitime défense
- Le Surréalisme et la Peinture ; derniÚre édition revue et augmentée de 1965
- Second manifeste du Surréalisme
- MisÚre de la poésie
- Qu’est-ce que le surrĂ©alisme ?
- Position politique du surréalisme
- Notes sur la poĂ©sie, en collaboration avec Paul Ăluard
- Trajectoire du rĂȘve
- Dictionnaire abrégé du surréalisme
- Anthologie de l’humour noir ; Ă©dition augmentĂ©e 1950
- Situation du surréalisme entre les deux guerres
- ProlĂ©gomĂšnes Ă un troisiĂšme manifeste du surrĂ©alisme ou non, prĂ©cĂ©dĂ© d’une rĂ©Ă©dition des deux Manifestes
- Yves Tanguy
- Ode Ă Â Charles Fourier
- Flagrant délit
- Entretiens avec AndrĂ© Parinaud, retranscriptions d’entretiens radiodiffusĂ©s
- La ClĂ© des champs, recueil d’essais publiĂ©s entre 1936 et 1952
- Du surrĂ©alisme en ses Ćuvres vives
Bibliographie
- Marguerite BONNET, « BRETON ANDRĂ – (1896-1966) ». In Universalis Ă©ducation [en ligne]. EncyclopĂŠdia Universalis, consultĂ© le 21 dĂ©cembre 2016. Disponible sur http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/andre-breton/
- âANDRĂ BRETON, LE PĂRE DU SURRĂALISME,â surrealiste.net, page consultĂ©e le 19 dĂ©cembre 2016, http://www.surrealiste.net/histoire/andre-breton.html.
- Jacques JOUET, « SURRĂALISME – Les revues surrĂ©alistes ». In Universalis Ă©ducation [en ligne]. EncyclopĂŠdia Universalis, consultĂ© le 21 dĂ©cembre 2016. Disponible sur http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/surrealisme-les-revues-surrealistes/
- François Ouellet, « Le siÚcle de Breton », Nuit blanche, magazine littéraire, n° 79, 2000, p. 42-44.
- HervĂ© VANEL, « SURRĂALISME – (repĂšres chronologiques) ». In Universalis Ă©ducation [en ligne]. EncyclopĂŠdia Universalis, consultĂ© le 21 dĂ©cembre 2016. Disponible sur http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/surrealisme-reperes-chronologiques/
- https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Champs_magnétiques
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