Camille Arambourg naĂźt Ă Paris en 1885, dans une famille de notables terriens. Il grandit en AlgĂ©rie et, aprĂšs des Ă©tudes en lettres, mathĂ©matiques et philosophie, il s’oriente vers l’agronomie. PassionnĂ© d’agriculture, il passe une bonne partie de sa jeunesse Ă explorer les propriĂ©tĂ©s familiales dans le Sahel dâOran. Cette passion lui ouvre les portes de la recherche en gĂ©ologie en 1908.
Durant ses recherches dans ses propriĂ©tĂ©s, il fait la dĂ©couverte de poissons fossiles quâil conserve et examine. Il consacre son temps Ă lâagriculture et Ă la recherche zoologique. Durant la PremiĂšre guerre mondiale, il est recrutĂ© par lâarmĂ©e comme lieutenant d’un rĂ©giment de zouaves. Ses travaux de recherche sâarrĂȘtent alors quelques temps. CantonnĂ© avec lâarmĂ©e française au Nord de Salonique, il dĂ©couvre dâimportantes gisements de vertĂ©brĂ©s. Il entreprend des fouilles, rassemble une grande collection de vertĂ©brĂ©s fossiles qu’il expĂ©die en AlgĂ©rie pour les Ă©tudier. Il retourne en AlgĂ©rie aprĂšs une longue pĂ©riode de convalescence dans un hĂŽpital de Salonique.
Ă son retour, de 1920 Ă 1936, il se consacre Ă lâenseignement de la gĂ©ologie Ă lâInstitut d’agriculture algĂ©rienne de Maison-CarrĂ©e, qui deviendra plus tard l’Ăcole nationale supĂ©rieure agronomique d’Alger. Il voyage beaucoup, dans diffĂ©rents pays, pour ses recherches. Durant les annĂ©es prĂ©cĂ©dant sa mort, il frĂ©quente diffĂ©rents laboratoires et continue ses recherches sur les vertĂ©brĂ©s fossiles. ConseillĂ© et guidĂ© par Marcelin Boule, il finit par succĂ©der Ă ce dernier Ă la chaire de PalĂ©ontologie du Museum national d’histoire naturelle, de 1936 Ă 1956, ce qui lui permet de donner une plus grande portĂ©e acadĂ©mique Ă ses travaux.
Camille Arambourg fut le laurĂ©at de plusieurs prix prestigieux dont le prix Albert-Gaudry1 de la SociĂ©tĂ© GĂ©ologique de France en 1959. Il reçut Ă©galement le titre de docteur honoris causa de lâUniversitĂ© libre de Bruxelles et fut membre dâhonneur ou membre correspondant de plusieurs sociĂ©tĂ©s scientifiques en France, aux Ătats-Unis, en Afrique, en Angleterre, en Inde, au Portugal, en Italie et en Belgique. Il meurt Ă Paris en 1969.
Un peu d’histoire scientifique
GrĂące aux travaux du palĂ©ontologue Auguste Pomel en AlgĂ©rie et dans tout lâAfrique du Nord, la fin du XIXĂšme siĂšcle marque un tournant dans la connaissance des mammifĂšres fossiles des Ăšres tertiaires et quaternaires. Certains fossiles sont extraits de cĂ©lĂšbres gisements, comme la sabliĂšre de Ternifine2, prĂšs de Mascara, dans laquelle, en 1935 et 1956, Arambourg fera la dĂ©couverte des plus anciens fossiles humains dâAfrique du Nord3.
En 1910, le zoologiste Jean-LĂ©once-François Joleaud4 Ă©tablit les relations zoogĂ©ographiques des principaux vertĂ©brĂ©s plio-quaternaires et quaternaires de lâAlgĂ©rie et contribue Ă documenter la faune du pays. Camille Arambourg utilisa son travail et reprit lâensemble des collections Ă©tudiĂ©es par ses prĂ©dĂ©cesseurs en y ajoutant ses propres dĂ©couvertes. Il ne cesse de se dĂ©placer pour ses recherches, voyageant en Afrique du Nord et en Afrique Orientale, au Tchad, au Soudan, en Angola, au Gabon, au Proche et au Moyen-Orient mais aussi en Chine et en Europe
« J’ai consacrĂ© Ă la recherche sur le terrain une grande partie de mon activitĂ© … j’ai en effet toujours pensĂ© qu’il y avait pour un PalĂ©ontologiste le plus grand intĂ©rĂȘt Ă effectuer lui-mĂȘme la rĂ©colte. »
Une bonne partie de ses travaux est consacrĂ©e aux hominidĂ©s: australopithĂšques en Ăthiopie, industries de galets amĂ©nagĂ©s dans le constantinois, pithĂ©canthropes Ă Ternifine, nĂ©andertaliens du Djebel Irhoud, hommes fossiles du palĂ©olithique supĂ©rieur des grottes de d’Afalou-bou-Rhummel et des Beni-Segoual… Tous ces travaux et recherches lâaidĂšrent Ă se pencher sur les problĂšmes dâorigine et dâĂ©volution de lâhomme. Il Ă©tudia ces vestiges avec une attention soutenue et avec un grand intĂ©rĂȘt.
« Les fossiles sont des vestiges d’ĂȘtres qui ont vĂ©cu et c’est en tant qu’ĂȘtres vivants qu’ils doivent ĂȘtre considĂ©rĂ©s. »
Sa contribution Ă l’histoire de l’humanitĂ©
On ne peut pas parler dâĂ©volution de l’homme sans citer Arambourg. Il soutenait que lâhomme moderne Ă©tait le descendant de lâhomme de NĂ©andertal. Son Ă©poque correspond Ă une floraison de la recherche scientifique en Afrique du Nord pendant laquelle plusieurs musĂ©es voient le jour et de nombreux articles scientifiques sont publiĂ©s dans des revues nationales et internationales. Les chercheurs enseignent leurs dĂ©couvertes aux EuropĂ©ens et non aux AlgĂ©riens, qui sont alors colonisĂ©s. Ce qui fut considĂ©rĂ© comme un handicap pour les AlgĂ©riens au moment de continuer ce travail de recherche aprĂšs le dĂ©part des français.
Les collections du Museum d’histoire naturelle de Paris provenaient des expĂ©ditions coloniales et le contenu des missions de Camille Arambourg s’y ajoutent. Vers les annĂ©es 1900, la crĂ©ation du Jardin des Plantes, alors considĂ©rĂ© comme le plus grand jardin colonial français, permit lâexposition des restes des fossiles des vertĂ©brĂ©s provenant du Maghreb et dâAlgĂ©rie. Certains sâinquiĂ©tĂšrent de lâexploitation illimitĂ©e des ressources provenant de la colonie, incluant aussi la pĂȘche et la chasse, mais cela permettra aux chercheurs de faire connaĂźtre leur travaux et leurs dĂ©couvertes et aux amateurs dây avoir accĂšs. Les visites augmentĂšrent dans les musĂ©es et l’intĂ©rĂȘt des savants aussi.
Sa pensée scientifique
Naturaliste spĂ©cialisĂ© en palĂ©ontologie des vertĂ©brĂ©s et gĂ©ologue statigraphe, Camille Arambourg traitait des mammifĂšres, des poissons, des reptiles et de la palĂ©ontologie humaine. Il ne cessa de chercher lâorigine des espĂšces que ce soit en Europe, en Afrique ou en Asie et leurs rĂ©partitions marines ou continentales.
Son approche divergeait de la plupart de ses pairs. Pour lui, le milieu transformait les espĂšces au cours de lâĂ©volution. Il rejeta la thĂ©orie de Darwin et pris position pour le lamarckisme.
C’Ă©tait avant tout un homme de terrain et sa vision des fossiles changeait parfois dâorientation interprĂ©tative. Selon lui, le milieu agissait sur lâadaptation des formes animales et les grands phĂ©nomĂšnes gĂ©odynamiques avaient un impact sur les vagues fauniques. Il pensait que ces variations environnementales transformaient les organismes par les mutations gĂ©nĂ©tiques et que lâhĂ©rĂ©ditĂ© Ă©tait impactĂ©e par le milieu environnant â une vision dont il changea toutefois juste avant sa mort.
Domaine public
En 2020, toute lâĆuvre de Camille Arambourg, constituĂ©e des 29 ouvrages rĂ©pertoriĂ©s par la BNF ainsi que d’autres publications, articles, mĂ©moires et correspondances, s’Ă©lĂ©vera dans le domaine public canadien, incluant son « Que sais-je » sur La gĂ©nĂšse de L’HumanitĂ©5, qui fut rĂ©Ă©ditĂ© sept fois de son vivant6.
Sources et références
- « Camille Arambourg » dans Wikipédia. [lire en ligne]
- Hadjouis Djillali. « Camille Arambourg, Ă la recherche des fossilles dâAlgĂ©rie ». Inference, Volume 4, n°1, mai 2018. [lire en ligne]
- Yves Coppens. « Camille Arambourg et Louis Leakey ou un 1/2 siÚcle de paléontologie africaine ». Bulletin de la Société préhistorique francaise, 1979, Année 1979, 76-10-12, pp. 291-323. [lire en ligne]
- Hadjouis Djillali. Camille Arambourg, un palĂ©ontologue, de lâAlgĂ©rie Ă lâAfrique profonde. PrĂ©face dâYves Coppens. Paris: Ăd. Harmattan, 2012. [fiche BAnQ]
- « Camille Arambourg » dans l’encyclopĂ©die Universalis. [accĂ©der en ligne $$]
- Yves Coppens. « Camille Arambourg, homo fossilis ». MĂ©moire d’Afrique du Nord.
Notes et liens complémentaires
- Prix Albert Gaudry. Société géologique de France. [lire en ligne]
- NommĂ©, aujourd’hui, site acheulĂ©en de Tighennif.
- Djillali, 2012. Voir aussi: Camille Arambourg, « Le gisement de Ternifine et l’Atlanthropus », Bulletin de la SociĂ©tĂ© prĂ©historique française, 1955, 52-1-2, pp. 94-95. [lire en ligne]
- P. Lester. « Nécrologie: Léonce Joleaud ». Journal des Africanistes, 1938, 8-2 pp. 201-206. [lire en ligne]
- Camille Arambourg. La gĂ©nĂšse de l’humanitĂ©. Paris: Presses universitaires de France. 1943.
- PubliĂ©e en 1969, annĂ©e de la mort d’Arambourg, la huitiĂšme Ă©dition a Ă©tĂ© partiellement numĂ©risĂ©e par la BibliothĂšque nationale de France (Ă 15% seulement). [lire en ligne]
Illustration
- Camille Arambourg, vers les années 40. Studio Harcourt. Collection des portraits de la bibliothÚque centrale, Muséum national d'histoire naturelle (Paris) - Direction des bibliothÚques et de la documentation.
- Couverture du « Que Sais-je » de Camille Arambourg sur La génÚse de l'Humanité. Source: BNF.